Mediator

Un crime chimiquement pur
Irène Frachon et Eric Giacometti
François Duprat
Delcourt
2023
Album broché de 200 pages au format 20,5×26,5 cm

C’est un album coup de poing qui revient sur le scandale du médicament Mediator qui tua des milliers de personnes, sur le combat du Dr Frachon, lanceuse d’alerte, confrontée à un laboratoire pharmaceutique prêt à tout pour étouffer l’affaire, sur notre système de prévention de la santé de l’époque qui égrainait les scandales (sang contaminé, hormone de croissance, amiante, Isoméride, chlordécone, prothèses mammaires PIP…).
1994, retour sur l’Isoméride, précédent coupe-faim du laboratoire, le Dr Frachon est interne dans le service à l’origine du lien entre Isoméride et HTAP (HyperTension Artérielle Pulmonaire) responsable de décès par risques pulmonaires gravissimes.
Son équivalant américain (Redux) sera interdit en septembre 1997 un an après sa commercialisation, puis immédiatement retiré en France.
Antibes 2004, Pascale meurt subitement la nuit d’une insuffisance cardiaque aigue à 51 ans. Début d’une longue série d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Dans le service du Dr Irène Frachon, celle-ci développe peu à peu des soupçons sur le Médiator, dérivé comme l’Isoméride de l’amphétamine. En 2007 le Dr Frachon établit le lien chimique entre Isoméride et Mediator.
2008, 300 000 français prennent du Mediator. Le Dr Irène Frachon réalise alors un travail de fourmi dans les archives de l’hôpital de Brest. Par extrapolation elle craint des milliers de décès par Mediator. Irène poursuit son travail fastidieux de recherches de preuves, les accumule peu à peu. Enfin fin 2009, l’Agence du médicament face aux preuves retire le Mediator du marché dans la plus grande discrétion.
Hélène veut révéler au grand jour le scandale dans toutes ses dimensions et écrit un livre “Mediator, combien de morts? paru en 2010”.
Enfin en 2011, le scandale éclate, une loi sur la sécurité du médicament est votée, les malades se regroupent en association.
2013, le laboratoire Servier accepte une indemnisation mais les procédures de reconnaissance des victimes trainent en longueur. Nombre de victimes meurent avant d’être indemnisées.
2019, enfin le procès, 2 600 parties civiles, 7 mois d’audiences. Servier est reconnu coupable de tromperie aggravée, blessures et homicides involontaires et 2,7 millions d’euros, une broutille face à ses bénéfices et 200 millions de dommages aux  victimes.
L’appel est toujours en attente.

L’histoire de l’empire Servier et son président est minutieusement racontée, ses découvertes, ses techniques publicitaires et de vente. Servier, sans actionnaire, maitrise tout.
De coupe-faim, Servier attribue au Mediator un pouvoir antidiabétique adjuvant aux autres traitements. Le battage publicitaire auprès des médecins en fait rapidement un succès colossal.
Falsifications, lobbying, pressions, menaces, procès en diffamation, procès en appel et cassation, c’est le parcours du combattant pour le Dr Frachon pour se faire entendre de l’Agence du médicament.

En tant que médecin, j’ai suivi le scandale Mediator, mais je reste sidéré de l’ampleur, des magouilles,  des accointances politiciennes qui ont accompagné Servier durant des décennies. C’est vertigineux. J’aimerais croire que c’est du passé, qu’après tous ces scandales sanitaires franco-français, on a tiré des leçons, hélas je crains qu’un jour nous en découvrirons un autre, grâce à la ténacité d’une guerrière comme le Dr Frachon, véritable héroïne des temps modernes.

Mediator un crime chimiquement pur
Copyright Duprat/Delcourt
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